Francis VARENNES – Juriste-Fiscaliste

Francis VARENNES – Juriste-Fiscaliste

Droit de l’entreprise agricole – Droit du tourisme chez l’habitant

FORMATIONS  – PUBLICATIONS   – DIFFUSION

Choix d’un statut juridique, fiscal et social pour la création d’une activité indépendante

(activités commerciales, artisanales et libérales)
EI, AE, EIRL, EURL ou SASU ?

Section 2. Apprécier les contraintes administratives des différents types d’entreprises en cours de fonctionnement

Les contraintes administratives au cours de la vie de l’entreprise peuvent sensiblement varier selon la forme juridique de l’entreprise choisie. Elles s’articulent principalement autour des cinq points suivants :

– l’ouverture d’un compte bancaire (§ 1),

– le dépôt des comptes (§ 2),

– les sanctions pénales applicables (§ 3),

– l’existence de capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social (§ 4),

– le régime juridique des conventions conclues entre les sociétés et les associés (§ 5).

§ 1. L’ouverture d’un compte bancaire

L’ouverture d’un compte bancaire propre à l’activité professionnelle n’est pas systématiquement une obligation. Il faut distinguer selon la forme juridique de l’entreprise.

Il est à noter la pratique des établissements bancaires qui exigent l’ouverture d’un compte bancaire dit professionnel comprenant des frais plus ou moins élevés. À ce titre, il est aussi possible d’utiliser un compte bancaire classique aux frais plus réduits en présence d’une entreprise individuelle. La solution est plus délicate si le créateur utilise un nom commercial distinct de son nom patronymique, puisque l’établissement bancaire doit admettre l’encaissement de chèques à l’ordre de ce nom commercial. De même, la création d’une société ne permet pas d’éviter l’ouverture d’un compte bancaire dit professionnel.

Les EI (hors EIRL)

Les personnes physiques exerçant à titre individuel une activité commerciale ont l’obligation d’avoir un compte bancaire puisque tout commerçant est tenu de se faire ouvrir un compte dans un établissement de crédit ou dans un bureau de chèques postaux (art. L. 123-24 du code de commerce).

En revanche, l’exercice d’une activité artisanale ou libérale n’est pas soumis à cette obligation d’ouverture d’un compte bancaire. Cela étant, d’un point de vue pratique, il est fortement recommandé d’ouvrir un compte bancaire spécifique à l’activité professionnelle, même lorsqu’aucun texte n’en prévoit l’obligation, afin d’assurer un suivi financier propre à l’activité exercée.

Les micro-entrepreneurs

Depuis l’entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, tout personne relevant du statut de micro-entrepreneur est en principe tenue de faire ouvrir un compte bancaire dans un établissement de crédit ou dans un bureau de chèques postaux qui doit être dédié à l’exercice de l’ensemble des transactions financières liées à son activité professionnelle (art. L. 133-6-8-4 du code de la sécurité sociale créé par l’art. 94 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015).

Plus précisément, les personnes concernées sont tenues, au plus tard douze mois après la déclaration de la création de leur entreprise, de dédier un compte ouvert, dans un des établissements bancaires, à l’exercice de l’ensemble des transactions financières liées à leur activité professionnelle.

Il est à noter que l’article 39 de la loi PACTE du 22/05/2019 a aménagé ce dispositif en précisant que l’obligation d’un compte bancaire dédié n’est obligatoire que lorsque le micro-entrepreneur réalise un chiffre d’affaires annuel supérieur à 10 000 euros pendant deux années civiles consécutives (art. L. 613-10 du code de la sécurité sociale).

Les EIRL

Dans tous les cas, l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée est tenu de faire ouvrir dans un établissement de crédit un ou plusieurs comptes bancaires exclusivement dédiés à l’activité à laquelle le patrimoine a été affecté. Il en est ainsi pour l’ensemble des personnes qui adoptent le statut d’EIRL, quelle que soit la nature juridique des activités exercées (art. L. 526-13 du code de commerce).

Chaque compte bancaire ouvert par l’entrepreneur pour les besoins de l’activité professionnelle à laquelle un patrimoine a été affecté doit contenir dans son intitulé la dénomination prévue au 2° de l‘article R. 526-3 du code de commerce ainsi que les  mots : « entrepreneur individuel à responsabilité limitée » ou les initiales : « EIRL » (art. R. 526-11 du code de commerce).

Les EURL et les SASU

Les sociétés sont systématiquement visées par l’obligation d’ouverture d’un compte bancaire qui est impérative du fait de la personnalité juridique propre dont dispose chaque société de droit.

§ 2. Le dépôt des comptes de l’entreprise

Les EI et les AE (hors EIRL)

Les entreprises individuelles, y compris les auto-entrepreneurs, qui n’ont pas adopté le statut d’EIRL n’ont pas à déposer leurs comptes, même s’il s’agit de commerçants.

De plus, il n’existe pas de formalisme spécifique lié aux décisions de distribution des bénéfices en raison de l’absence d’assemblées générales.

Les EIRL (AE ou non)

Les comptes de l’EIRL doivent être déposés chaque année auprès du registre de déclaration initiale (art. L. 526-14 du code de commerce).

Cette obligation concerne l’ensemble des EIRL quelles que soient les activités exercées, y compris les auto-entrepreneurs ayant adopté ce statut. Cette règle s’applique également quel que soit le régime fiscal de l’EIRL (régime réel ou régime des micro-entreprises).

Les documents à déposer sont les suivants :

– le bilan pour les EIRL soumises à un réel d’imposition des bénéfices. Sur ce point, il est à noter la simplification opérée par l’article 33 de la loi du 18 juin 2014 qui fait qu’il n’est plus nécessaire de déposer l’ensemble des comptes annuels ;

– le modèle de déclaration défini par l’arrêté du 28/9/2011 pour les EIRL relevant d’un régime fiscal des micro-entreprises (micro-BIC ou micro-BNC).

(V. Annexe 5-2 à l’article A. 526-3 du code de commerce)

En cas de non-respect de cette règle, il n’existe pas de sanction pénale à la différence des sociétés commerciales (V. ci-dessous). En revanche, il est à noter la possibilité de déchéance du statut d’EIRL, ce qui a pour effet que l’entrepreneur engage l’ensemble de son patrimoine comme un entrepreneur individuel classique à l’égard des créanciers professionnels.

Le tarif des formalités de dépôt des comptes annuels des EIRL est déterminé comme suit : soit 5 taux de base (5 x 1,30 €) (art. L. 526-19 du code commerce ;  annexe 7-5 du code de commerce modifié par le décret du 11/2/2011 – tarif n° 233).

Les personnes ayant effectué une déclaration d’affectation en relevant du statut de micro-entrepreneurs en faisant application des régimes fiscaux des micro-entreprises prévus aux articles 50-0, 64 bis et 102 ter du code général des impôts doivent tenir :

1° Un livre des recettes et, lorsque la nature de leur activité le requiert, un registre des achats, tels que prévus à l’article L. 123-28 ;

2° En date du 31 décembre de chaque année, un relevé actualisant, en valeur et en nature, le patrimoine affecté, selon un modèle type approuvé par arrêté. Ce relevé fait l’objet d’un dépôt annuel au registre auprès duquel les intéressés sont immatriculés en tant qu’EIRL dans le délai de six mois suivant son établissement.

(art. R. 526-10-1 du code de commerce)

A ce titre, il convient d’utiliser le Modèle type de relevé d’actualisation du patrimoine affecté précisé par l’arrêté du 25 septembre 2019 relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée.

 Les EURL et les SASU

 Principes

 Les dirigeants des SARL, y compris des EURL, doivent procéder au dépôt des comptes de la société auprès du registre du commerce et des sociétés dans le mois qui suit l’assemblée générale  d’approbation des comptes (art. L. 232-22 et suivants du code de commerce). Cette solution s’applique également aux sociétés par actions simplifiées (y compris les SASU) (art. L. 232-23 du code de commerce).

Depuis 2014, lors du dépôt des comptes, les sociétés répondant à la définition des micro-entreprises (qui n’a rien à voir avec le statut de micro-entrepreneur : voir ci-dessous) peuvent désormais déclarer que les comptes annuels qu’elles déposent ne sont pas rendus publics (à l’exception des sociétés holding) (art. L. 232-25 du code de commerce inséré par l’art. 5 de l’ordonnance n° 2014-86 du 30 janvier 2014 allégeant les obligations comptables des micro-entreprises et petites entreprises).

Lorsque ces sociétés choisissent de ne pas rendre publics les comptes annuels qu’elles déposent en annexe au registre du commerce et des sociétés (RCS), elles accompagnent ces comptes d’une déclaration de confidentialité établie conformément à un modèle défini par arrêté (V. Annexe 1-5 à l’article A. 123-61-1 du code de commerce).

Par micro-entreprises au regard du code de commerce (à différencier de la définition fiscale des micro-entreprises), il faut comprendre les entreprises dont les seuils ci-après ne sont pas dépassés : le total du bilan est fixé à 350 000 euros, le montant net du chiffre d’affaires à 700 000 euros et le nombre moyen de salariés employés au cours de l’exercice est de 10 (art. R. 123-200 du code de commerce). 

Les autorités judiciaires, les autorités administratives ainsi que la Banque de France ont toutefois accès à ces comptes. De plus, les sociétés doivent assurer la tenue d’un registre des délibérations consignant les procès-verbaux des délibérations prises par les associés.

Documents à déposer

Les documents sociaux annuels à déposer sont les suivants.

En premier lieu, il s’agit des comptes annuels et des autres documents connexes à ces comptes. Les comptes annuels de chaque exercice écoulé sont établis après la clôture.

Ces documents comprennent, de façon indissociable, les états suivants :

– le bilan : ce document décrit séparément l’ensemble des ressources (passif social) et des emplois de ces ressources (actif social) dont dispose la société à la clôture de l’exercice ;
–  le compte de résultat : ce document récapitule les produits (le montant des biens et services fournis par la société) et les charges (le montant des biens et services consommés par la société) de l’exercice ainsi que le résultat de leur différence, c’est-à-dire selon le cas un solde positif (bénéfice) ou négatif (perte). Ce solde représente le résultat de l’exercice.

L’obligation d’établir l’annexe qui devait être jointe au bilan et au compte de résultat est supprimée pour les micro-entreprises et les PME pour les exercices annuels clos depuis le 31 décembre 2013 et les comptes déposés à partir du 1er avril 2014, si elles remplissent au moins 2 des critères suivants : total de bilan de moins de 350 000 €, chiffre d’affaires net de moins de 700 000 €, employant moins de 10 salariés (Ordonnance n° 2014-86 du 30 janvier 2014 allégeant les obligations comptables des micro-entreprises et petites entreprises).

Il est à noter également la dispense de dépôt du rapport de gestion pour les EURL et les SASU (en réalité d’une portée pratique limitée).

En second lieu, il convient de procéder au dépôt de la proposition d’affectation du résultat de l’exercice soumise à l’assemblée générale ordinaire annuelle (ou à l’associé unique d’une EURL ou d’une SASU lorsque celui-ci n’est pas le dirigeant de la société) et la résolution d’affectation votée (ou la décision de l’associé unique dans le cas d’une EURL ou d’une SASU lorsque celui-ci n’est pas le dirigeant de la société).

Concrètement, ces informations figurent sous la résolution consacrée à l’affectation du résultat de l’exercice figurant au procès-verbal de l’assemblée ayant statué sur les comptes annuels. Aussi, les informations requises peuvent donner lieu au dépôt soit de l’entier procès-verbal ou seulement d’un extrait de celui-ci les contenant.

 D’un point de vue pratique, dès lors que, dans l’EURL et la SASU, l’associé unique, personne physique, assume seul la gérance ou la présidence de la société, ces sociétés sont dispensées de l’obligation de déposer la décision d’approbation des comptes par l’associé concerné car, légalement, le dépôt au greffe des comptes annuels, dûment signés par le représentant légal (pour l’original) ou signés et certifiés conformes à l’original (en cas de copie), vaut à lui seul approbation de ceux-ci par l’associé unique (art. L. 223-31 du code de commerce pour les EURL ; art. L. 227-1 du code de commerce pour les SASU).

L’ensemble de ces documents doit être signé et certifié conforme par le représentant légal de la société qui est le gérant de l’EURL ou le président de la SASU.

Périodicité et délai de l’obligation du dépôt

Le dépôt des comptes annuels et de leurs documents connexes doit avoir lieu une fois par an et au plus tard sept mois après la clôture de l’exercice écoulé. En effet, le dépôt doit intervenir au plus tard dans le mois suivant l’approbation (ou le refus d’approbation) des comptes, selon le cas, par l’assemblée des associés, des actionnaires ou par l’associé unique (art. R. 123-111 du code de commerce). Cette approbation doit, elle-même, impérativement intervenir dans les six mois de la date de clôture de l’exercice écoulé.

Cependant, une prorogation du délai de six mois pour approuver les comptes peut être accordée par le président du Tribunal de commerce sur requête du représentant légal de la société, présentée de préférence avant l’expiration dudit délai. Il est recommandé d’exposer dans la requête une estimation du délai supplémentaire demandé ainsi que les raisons de cette demande.

En outre, lorsque le délai d’un mois pour déposer les comptes suivant leur approbation (ou refus d’approbation) est expiré, il est encore possible de régulariser le dépôt des comptes à tout moment. Si le délai de dépôt est dépassé, le greffe du tribunal de commerce procède à une relance, voire plusieurs relances automatiques, avant que ce manquement donne lieu à des sanctions pénales présentées ci-après.

§ 3. Les sanctions pénales applicables

Le non-dépôt des comptes

Le non-dépôt des comptes des sociétés à responsabilité limitée, telles les EURL et les SASU, constitue une infraction pénale de 5ème classe pouvant faire l’objet d’une amende de 1 500 € qui peut être portée à 3 000 € en cas de récidive (art. R. 247-3 du code de commerce). Cette solution a été clairement confirmée par la Cour de cassation (Cass. 28/01/2009, n° 08-80884).

A la demande de tout intéressé, le président du tribunal de commerce, statuant en référé, peut conformément aux dispositions de l’article L 123-5-1 du Code de commerce, enjoindre sous astreinte au dirigeant de toute personne morale de procéder au dépôt des pièces et actes au registre du commerce et des sociétés auquel celle-ci est tenue par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur.

L’abus de biens sociaux

La gestion d’une entreprise, quelle que soit sa forme, ne doit pas donner lieu à des abus d’utilisation du patrimoine de l’entité économique, notamment à des fins privées, de la part du chef d’entreprise, au risque sinon pour celui-ci de faire l’objet de poursuites et de sanctions pénales. Ces sanctions sont différentes selon la forme de l’entreprise.

La notion d’abus de biens sociaux est spécifique aux entreprises organisées sous la forme de sociétés. Plus précisément, le délit d’abus de biens sociaux correspond au fait pour les dirigeants de certaines sociétés commerciales de faire de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu’ils savent contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement.

Cette notion d’abus de biens sociaux peut notamment concerner l’usage des biens ou le crédit de la société à des fins personnelles, l’attribution de rémunérations excessives, l’existence de comptes d’associés débiteurs (Cass. 28/02/2007, n° 06-80200).

Plus précisément, ce délit concerne les sociétés commerciales à responsabilité limitée telle la SARL (y compris l’EURL) (art. L. 241-3 du code de commerce) ou la SAS (y compris la SASU) (art. L. 242-6 par renvoi de l’art. L. 244-1 du code de commerce).

Le fait que ces sociétés soient éventuellement à associé unique ne change rien à ce principe. La solution selon laquelle la notion de biens d’abus sociaux s’applique aux dirigeants de sociétés unipersonnelles a été clairement confirmée par la jurisprudence (Cass. 14/06/1993, n° 92-80763).

Les sanctions encourues sont 5 ans d’emprisonnement (maximum) et de 375 000 € d’amende (maximum).

De plus, peuvent être prononcées, les peines complémentaires de la faillite personnelle, l’interdiction de gérer si la société se retrouve en état de cessation des paiements et que les détournements d’actifs sont qualifiés de banqueroute (art. L. 241-3-4° du code commerce ; art. L. 242-6-3°du code de commerce).

Il est à noter que la notion d’abus de biens sociaux n’existe pas pour les entreprises individuelles, y compris pour les EIRL.

§ 4. L’existence des capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social

Notion de capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social (idem pour EURL-SARL et SAS-SASU)

En cas de pertes comptables importantes d’une société commerciale, une série de formalités doit être accomplie afin de préciser le sort de la société concernée.

Plus précisément, si le montant des capitaux propres d’une SAS (ou SASU) ou d’une SARL (ou EURL) devient inférieur à la moitié du capital social, une procédure spécifique doit être suivie soit pour dissoudre la société, soit pour procéder à sa recapitalisation (art. L. 223-42 du code de commerce pour les EURL-SARL ; art. L. 225-248 du code de commerce par renvoi de l’art. L. 227-1 du code de commerce pour les SAS-SASU). L’objectif de cette disposition est de protéger les intérêts des créanciers de la société.

La notion de capitaux propres comprend les éléments suivants : le capital (libéré ou non), les réserves, les bénéfices non distribués des exercices antérieurs, le bénéfice ou le déficit de l’exercice, les provisions réglementées et les pertes.

Dans les 4 mois qui suivent l’assemble générale d’approbation des comptes de l’exercice déficitaire constatant le fait que les capitaux propres sont inférieurs à la moitié du capital social, le ou les associés doivent à nouveau se réunir en assemblée générale pour prendre une décision sur le sort de la société.

 Exemple :

 La SASU Dupond au capital de 50 000 €, a enregistré 80 000 € de pertes.

Par ailleurs, ses réserves s’élèvent à 20 000 €.

Les bénéfices des exercices antérieurs non distribués s’élèvent à 20 000 € et les provisions réglementées à 10 000 €.

Le montant des capitaux propres est de :

– (50 000 + 20 000 + 20 000 + 10 000 – 80 000) soit 20 000 €

Il est donc inférieur à la moitié du capital social qui est de 25 000 € (50 000 / 2).

L’exercice comptable correspond à l’année civile.

 La décision d’approbation des comptes a lieu le 15 juin 2017.

Une nouvelle décision des associés doit être prise dans les 4 mois afin de décider du sort de la société.

Procédure applicable en cas de capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social (idem pour EURL-SARL et SAS-SASU)

La constatation de capitaux propres en deçà des limites précitées doit donner lieu à une procédure qui comprend les différentes étapes suivantes :

en premier lieu, il convient de provoquer la réunion d’une assemblée générale extraordinaire (AGE) qui doit décider, soit de dissoudre tout de suite la société, soit de poursuivre l’activité sociale, malgré les pertes ;

en deuxième lieu, il faut procéder à la publication de la décision adoptée dans le mois même la décision prise dans un journal d’annonces légales ;

en troisième lieu, il faut réaliser le dépôt de cette décision au greffe du tribunal de commerce, afin qu’il en soit fait mention sur l’extrait K Bis de la société.

Le non-respect de ces formalités n’est plus pénalement sanctionné. L’amende de 4 500 € et la peine d’emprisonnement de 6 mois ont été supprimées par la loi Warsmann du 22 mars 2012 (suppression de l’art. L. 242-29 du code de commerce).

A défaut de décision prise par la société, toute personne y ayant intérêt (créancier, associé…), peut demander au tribunal de commerce la dissolution de la société sauf si, au jour où il statue, la régularisation a été faite.

Méthodes de régularisation pour renflouer la société

La situation anormale de capitaux propres inférieurs à la moitié du capital social doit être régularisée au plus tard à la clôture du 2ème exercice suivant celui au cours duquel les pertes ont été constatées. Ce délai court à compter de l’assemblée générale d’approbation des comptes de l’exercice déficitaire.

Exemple (suite) :

– les résultats déficitaires de la SASU Dupond ont été approuvés le 15 juin 2017,

– la société a donc jusqu’au 31 décembre 2019 pour régulariser la situation.

Afin de réaliser la régularisation de la situation, il convient de mettre en œuvre l’une des solutions suivantes :

– il peut être procédé à l’augmentation du capital social de la société. Cette augmentation peut être faite au moyen d’apports nouveaux, en numéraire (argent) ou en nature (biens). L’augmentation peut également être réalisée par le biais de la réévaluation libre des éléments d’actifs immobilisés. La réévaluation doit porter sur tous les actifs corporels et financiers de l’entreprise. L’écart de réévaluation est inscrit parmi les capitaux propres ;

– il peut aussi être procédé à la réduction du capital social de la société. Le capital peut être réduit d’un montant au moins égal à celui des pertes de la société. Une partie des titres est annulée au lieu d’être remboursés aux associés. Ils vont servir à compenser les pertes enregistrées ;

– les associés peuvent réaliser un « coup d’accordéon ». Cette méthode consiste à réduire puis à augmenter le capital (ou inversement) dans un délai très court ;

– la société peut enfin réaliser des bénéfices suffisants afin de revaloriser ses capitaux propres. Le résultat de l’exercice étant compris dans les capitaux propres, tout résultat positif, s’il est suffisant, permet de redresser la situation.

§ 5. Le régime juridique des conventions conclues entre les sociétés et les associés

Afin de s’assurer que les associés n’abusent pas du patrimoine de la société, entité juridique autonome et distincte même en présence d’une société unipersonnelle, la législation encadre les modalités de conclusion des conventions qui peuvent être établies entre les intéressés.

Ces dispositions concernent plus spécifiquement les sociétés à responsabilité limitée que sont notamment les EURL-SARL et les SASU-SAS.

Sur ce point, le code de commerce distingue les différentes conventions suivantes :

– les conventions libres (ou courantes) qui peuvent être réalisées sans contrôle particulier du fait qu’elles sont sans risque pour la société. Il s’agit notamment des conventions de trésorerie rémunérée, des contrats de travail ;

– les conventions réglementées qui peuvent être conclues selon une procédure de contrôle car elles sont susceptibles de causer un préjudice à la société. A titre d’exemples de conventions réglementées, il convient de citer la conclusion d’un bail entre la société et un dirigeant, l’attribution d’intérêts au profit de sommes versées en compte courant, l’attribution d’un avantage en nature, la vente de biens entre la société et un dirigeant, les prestations de services entre les intéressés ;

– les conventions interdites que les dirigeants et les associés ne doivent pas conclure avec la société car elles peuvent constituer un danger pour la société. Cette interdiction vise la souscription d’emprunts auprès de la société, la réalisation de découvert en compte courant ou autrement, le fait de faire cautionner ou avaliser par la société ses engagements envers des tiers.  

Les conventions interdites irrégulièrement contractées sont sanctionnés d’une nullité absolue qui peut être invoquée par les tiers et les créanciers sociaux lésés si ceux-ci peuvent justifier d’un intérêt légitime à agir.

Le principe des conventions interdites a pour effet que le compte courant de l’associé unique d’une société unipersonnelle ne doit être en position débitrice. En cas de non-respect, l’associé unique peut être condamné à rembourser à la société la somme due au titre du compte courant débiteur (Cass. 25/09/2012, 11-22337).

Pour éviter que les dirigeants des sociétés ne profitent de leurs fonctions pour conclure à leur profit une convention désavantageuse pour la société et afin de prévenir des conflits d’intérêts un mécanisme de contrôle s’applique aux conventions dites réglementées par la présentation d’un rapport spécial à l’assemblée générale.

Lorsque la société est unipersonnelle avec un seul associé, la conclusion de conventions réglementées doit simplement être mentionnée dans le registre des décisions ou des délibérations (art. L. 223-19 (3ème alinéa) du code de commerce pour les EURL ; art. L. 227-10 du code de commerce pour les SASU).

Contrairement à la procédure à suivre dans les sociétés comprenant plusieurs associés, le dirigeant n’a pas à établir de rapport spécial sur les conventions réglementées. A titre d’exemple, la décision fixant la rémunération du gérant associé unique d’une entreprise à responsabilité limitée doit être répertoriée dans le registre prévu à l’article L. 223-31, alinéa 3, du code de commerce  (Cass. 25/09/2012, 11-22337).