Choix d’un statut juridique, fiscal et social pour la création d’une activité indépendante
(activités commerciales, artisanales et libérales)
EI, AE, EIRL, EURL ou SASU ?
Section 2. Déterminer les modalités et les conséquences juridiques du changement de statut de l’entreprise
L’appréciation des modalités et des conséquences du changement de statut doit être effectuée selon que les modifications sont les suivantes :
– la déclaration d’affectation d’une EI existante pour l’adoption du statut de l’EIRL (§ 1),
– la transformation d’une société préexistante (§ 2),
– l’apport d’une EI à une société (§ 3),
– l’apport d’une EIRL à une société (§ 4).
§ 1. La déclaration d’affectation des biens professionnels d’une EI préexistante pour l’adoption du statut de l’EIRL
Comme en cas de création d’entreprise, l’adoption du statut de l’EIRL à partir d’une EI préexistante nécessite :
– le dépôt d’une déclaration d’affectation auprès du CFE compétent (avec les formulaires P2 et PEIRL)
(V. formulaires sur le site internet officiel : http://www.entreprises.gouv.fr/a-votre-service/formulaires-teleprocedures ;
– la souscription de la déclaration d’affectation mentionnant les biens, droits, obligations et sûretés faisant partie du patrimoine professionnel accompagnée des pièces annexes comme en cas de création d’entreprise avec l’adoption initiale du statut d’EIRL ;
– la rédaction d’un acte notarié en cas d’affectation de biens immobiliers ;
– l’immatriculation au registre idoine en tant qu’EIRL.
(V. 1ère partie sur les modalités d’adoption du statut d’EIRL)
§ 2. Les formalités en cas de transformation d’une société préexistante
Dans la présente hypothèse, l’entreprise a déjà été créée sous la forme d’une société. Toutefois, il est décidé de changer du type de société par exemple pour passer d’EURL à SASU, ou l’inverse de SASU à EURL.
A. Principes
L’entreprise créée sous la forme initiale d’une société peut faire l’objet de l’acte juridique de la transformation afin d’adopter une autre forme de société sans avoir à reprendre la procédure de création de la personne morale. Il en est ainsi si l’EURL est transformée en SASU, ou à l’inverse si la SASU est transformée en EURL.
Pour mémoire, il est utile de préciser que la transformation d’une société consiste en un changement de sa forme juridique. Ainsi, la transformation régulière d’une société ne donne pas naissance à une nouvelle personne morale. L’ancienne société continue son existence, sous une autre forme.
A ce titre, l’article L. 210-6 du code de commerce dispose en effet dans son premier alinéa : « La transformation régulière d’une société n’entraîne pas la création d’une personne morale nouvelle ».
A l’opposé, la mise en société d’une entreprise individuelle ne correspond pas à une opération de transformation. Dans ce cas, l’opération est une création de société et donne lieu à un apport (V. ci-après). Pour réaliser cette opération juridique de transformation, il convient de rédiger un procès-verbal constatant la décision de transformation de la société.
Par la suite, les formalités à accomplir sont les suivantes :
– l’enregistrement de l’acte de transformation auprès de l’administration fiscale avec en principe le paiement du seul droit fixe de 125 € ;
– la publication d’une annonce dans un journal d’annonces légales ;
– le dépôt au CFE compétent du formulaire M2 avec :
* les statuts mis à jour,
* le procès-verbal d’assemblée générale comprenant la décision de transformation et la mention éventuelle de nouveaux dirigeants,
– le rapport du commissaire à la transformation en cas de passage en SAS-SASU (V. ci-dessous).
B. Cas particulier de la transformation d’une société préexistante en SASU
Depuis la loi du 15 mai 2001, la transformation de toute société en SAS est subordonnée à la désignation impérative d’un commissaire à la transformation (art. L. 224-3 du code de commerce). Cette intervention est obligatoire quel que soit le contenu de la société. Le non-respect de cette procédure donne lieu au rejet du dossier de modification par le greffe du tribunal de commerce (CA Paris 8/2/2002, n° 02-317).
La fonction du commissaire à la transformation est d’établir un rapport mentionnant la valeur des biens composant l’actif social et de déterminer les avantages particuliers éventuels de certains associés.
Le commissaire à la transformation est un commissaire aux comptes même si la société n’a pas de commissaire aux comptes. A ce titre, les honoraires sont libres. Dans ces conditions, il n’est pas inutile de demander plusieurs devis afin de faire jouer la concurrence.
Cette procédure est inapplicable en cas :
– de création de SAS ab initio. Il est à noter toutefois l’intervention d’un commissaire aux apports en cas d’apports en capital social de biens en nature, sauf à pouvoir prétendre au cas de dispense présenté ci-dessus ;
– d’apport d’une EI à une SAS. Dans ce cas, un commissaire aux apports est en cas d’apports de biens en nature en capital social, sauf à pouvoir prétendre au cas de dispense présenté ci-dessus ;
– de transformation d’une SASU-SAS en EURL-SARL.
§ 3. L’apport d’une EI ou AE à une société : EURL-SARL ou SASU-SAS
Dans cette hypothèse, la forme initiale de l’entreprise est une entreprise individuelle qui évolue vers la création d’une société (EURL-SARL ou SASU-SAS). Dans ce cas, il faut créer la personne morale que constitue la société avec l’adoption de statuts. De plus, il faut apprécier les conditions de l’apport des biens de l’entreprise individuelle à la société créée.
A. L’apport de biens en nature à une EURL
L’apport de biens en nature à une EURL-SARL nécessite en principe l’intervention d’un commissaire aux apports.
Toutefois, l’associé unique peut décider de ne pas recourir à un commissaire aux apports lorsque la valeur d’aucun des apports en nature n’excède 30 000 € et si la valeur totale de l’ensemble des apports en nature non soumis à l’évaluation d’un commissaire aux apports n’excède pas la moitié du capital (art. L. 223-9 du code de commerce).
De plus, le recours à un commissaire aux apports n’est pas obligatoire si les conditions prévues à l’alinéa précédent sont réunies ou si l’associé unique, personne physique, exerçant son activité professionnelle en nom propre avant la constitution de la société, y compris sous le régime de l’EIRL prévu aux articles L. 526-6 à L. 526-21 du code de commerce, apporte des éléments qui figuraient dans le bilan de son dernier exercice.
Il est à noter que lorsqu’il n’y a pas eu de commissaire aux apports ou lorsque la valeur retenue est différente de celle proposée par le commissaire aux apports, les associés sont solidairement responsables pendant cinq ans, à l’égard des tiers, de la valeur attribuée aux apports en nature lors de la constitution de la société.
B. L’apport de biens en nature à une SASU
La réalisation d’apports en nature (c’est-à-dire de valeurs autres que des liquidités) nécessite en principe une évaluation extérieure avec l’intervention d’un commissaire aux apports. Celui-ci est choisi parmi les commissaires aux comptes ou les experts inscrits auprès des tribunaux. Cette règle suppose l’établissement d’un rapport et s’applique quelle que soit la valeur des apports. Il n’existe pas de cas de dispense possible comme pour les SARL-EURL comme mentionné ci-dessus.
Désormais, une dispense de commissaire aux apports est applicable si chacun des apports en nature n’excède pas 30 000 € et si la valeur totale de l’ensemble de ces apports en nature n’excède pas la moitié du capital (art. L. 227-1 du code de commerce ; art. D. 227-3 du code de commerce).
De plus, il est à noter la réforme initiée par la loi du 9/12/2016 (dite loi Sapin) qui ne rend plus obligatoire le recours au commissaire aux apports en cas de constitution d’une SASU par un entrepreneur individuel ou un EIRL. Plus précisément, le recours à un commissaire aux apports n’est pas obligatoire si l’associé unique, personne physique, exerçant son activité professionnelle en nom propre avant la constitution de la société apporte des éléments qui figuraient dans le bilan de son dernier exercice (art. L. 227-1 modifié du code de commerce).
§ 4. L’apport d’une EIRL à une société
La cession du patrimoine affecté de l’EIRL à une personne morale ou son apport en société entraîne le transfert de propriété dans le patrimoine de la société, sans maintien de l’affectation (art. L.526-17 du code de commerce). Cette opération donne lieu à la publication d’un avis publié dans un journal habilité.
Dans ce cas, la société ainsi créée devient débitrice des créanciers de l’EIRL apporteur ou cédant. Le transfert de propriété n’est opposable aux tiers qu’après l’accomplissement de la formalité de publication d’un avis. Le principe de la transmission d’une universalité étant acté tant à l’égard des débiteurs que des créanciers, aucune précision n’existe à ce jour sur les formalités à accomplir du fait de la cession de créances de l’EIRL cédant tel que prévu par l’art. 1690 du code civil.
Il est à noter que le régime de publicité prévu par le code de commerce en cas de cession d’un fonds de commerce (art. L. 141-1 à L. 141-22 du code de commerce) permettant aux créanciers du cédant de s’opposer au prix de vente n’est pas applicable en cas de cession ou d’apport en société du patrimoine affecté par un EIRL (art. L. 526-17-III du code de commerce).
Dans ce cas, il faut éventuellement faire intervenir un commissaire aux apports selon les règles applicables à la forme de la société choisie sauf l’application des cas de dispense mentionnés ci-dessus.